L’Évangile a casa 111: Marc 1, 1-8

L’Évangile a casa 111: Marc 1, 1-8

Annoncer Jésus à… poil?

Jean Baptiste était vêtu de «poil de chameau» (notez le singulier en français alors que le grec est au pluriel) et annonçait la venue d’ «un plus fort que lui, d’un plus haut que lui» qui «baptisera dans l’Esprit Saint»…

Chez Marc, pas de récit de la naissance de Jésus dans une mangeoire, pas d’anges qui chantent à tue-tête, pas d’étable ni de bergers, encore moins de mages et de cadeaux insensés pour un bébé… Mais une annonce de naissance tout de même. Parce qu’il faut bien commencer le récit par son début!

Et pour Marc, la venue de Jésus n’est pas d’abord histoire de symboles tirés tant de l’Ancien testament que des mythologies environnantes (chant des anges, mages…). Mais elle est ancrée dans le cri des prophètes, qui sont aussi la Bible! Qui plus est, le plus grand, Isaïe (dont on lit de nombreux passages pendant l’Avent). Car les prophètes appelant à la conversion – un leitmotiv chez eux – annoncent donc une «naissance» nouvelle si l’on y consent.

Oui, pour Marc, la naissance de Jésus n’est pas liée au cycle humain, mais à celui des temps prophétiques; elle est liée au Temps de Dieu: Jean est le phare, le bateau s’approche et Jésus en est le timonier ! Et la révolution, le changement de cap (vocabulaire de batelier!), c’est que Jean, lui, baptise pour le pardon des péchés – et cela semble attirer du monde, car «toute la Judée et tous les habitants de Jérusalem» convergent vers lui… cela en fait du monde! – mais Jésus, lui, baptisera «dans l’Esprit Saint». Surprenant saut dans la foi, déboussolant changement de paradigme, dérangeant redimensionnement de la vie religieuse: le péché, c’est concret, l’eau du Jourdain, c’est sensible; mais l’Esprit Saint… On est à un autre niveau. Là est la conversion de la démarche préparée par Jean et sublimée par le Christ. On peut partir du concret et éclore dans le… spirituel (au sens fort du terme). D’ailleurs, en filigrane, le baptême de l’Esprit Saint ferait-il écho… à la Pentecôte?

En même temps, Jean (comme bien des prophètes) crie dans le désert, voulant peut-être dire que malgré leur baptême dans le Jourdain, les foules qui entendent le premier degré, celui clamé par Jean, n’entendront pas le second, celui incarné par Jésus. Dans le fond, cette «naissance de Jésus» selon Marc, c’est l’entrelacement de la mission de Jean et de Jésus, le passage (Pâques…) d’une forme de baptême à une autre, d’une forme de repentir à une autre, d’une forme de conversion à une autre. Passer du «moi, je» exprimé par Jean, au «Lui, il» du Jésus qui vient…

Thierry Schelling