L’Évangile a casa 118: Marc 1, 40-45

L’Évangile a casa 118: Marc 1, 40-45

«Un lépreux vint auprès de Jésus.»

C’est déjà beaucoup, et peut-être même trop. Ces lépreux sont la quintessence de la personne bannie, honnie, ostracisée, mise au ban de la synagogue, de la famille, de la ville ou du village, de la société – de la vie intercommunautaire.

Par excellence, le lépreux est coupé de tout le monde, alors qu’il voit son corps partir en lambeaux… Son corps lui fait vivre ce que le monde des humains lui inflige: partir en morceaux…

«Saisi de compassion». Jésus a donc un cœur. Qui en aurait douté puisqu’il est humain à 100% ? Un cœur pour sentir, souffrir, aimer. Un cœur pour se lier aux autres, enfin… à certains autres: les lépreux, justement, les publicains, les adultères, les étrangers, les femmes et les enfants – la second class de son temps – et même les esclaves de soldat romain! Un cœur pour faire du lien, refaire du lien avec tout ce petit monde qui, à ses yeux, est grand – pour faire de la religion, qui veut dire «relation». «Pour qu’aucun de ceux et celles que mon Père m’a donné ne soit perdu», expliquera Saint Jean…

«Va te montrer au prêtre…» Etrange injonction pour le nouveau Moïse qu’est Jésus, qui enfreint les principales règles religieuses de son temps, mais qui conseille d’ «en venir aux codes de sa religion».

C’est pour que le lépreux soit accueilli à nouveau comme l’un du Peuple d’Israël – et les prêtres en attestent l’authentification. C’est peut-être aussi parce que Dieu prend son temps pour nous en donner à nous, afin que nous mûrissions en toute liberté vis-à-vis notamment de nos acquis religieux. Et cela implique de « renvoyer » chacun à son carquois d’idées et d’us et coutumes, mais enrichi de la rencontre avec Jésus, et laisser s’en imprégner, et laisser faire…

Car cette rencontre ne doit pas se transformer en un énième club spi, clan ésotérique (d’où le «ne dis rien à personne»), mais bien en une résurrection de vie nouvelle, comme un jaillissement dont le bénéficiaire doit pouvoir librement jouir et en partager la fraîcheur. Jésus n’est aucunement un guru, mais un maître, ne rêvant que de voir ses élèves grandir et devenir ses amis, ses égaux, ses pairs, ses frères et sœurs.

«De partout on venait à lui». C’est l’irrésistible attraction de cet être, Jésus, non pas tant par ses guérisons que par son ressenti (compassion), son toucher (du regard et de la main) et ses paroles («Je le veux, sois purifié»). La volonté de Dieu est claire: «Sois purgé !» (Un des sens du verbe purifier en grec). Il faut se vider pour laisser place à Lui, qui est compassion, caresse et volonté de vie en abondance. Si ça, ce n’est pas attirant?

Thierry Schelling