«Il a perdu la tête.»
On aurait tendance à minimiser les titres dépréciatifs de Jésus – «ivrogne, glouton», notamment! – au profit des éclats religieux: Messie, Fils de Dieu, Seigneur…
Or, c’est là où l’on fait faux: traiter Jésus d’«écervelé», ou, plus loin dans le texte du jour, de «possédé par Satan», nous apprend à cesser de croire que le blasphème offense Dieu (pas du tout, la preuve!), que les insultes et «traitements de non-faveur» font partie de l’ambiance d’une communauté chrétienne (la preuve encore une fois !). Certes, on aimerait croire au «tout-le-monde-il-est-beau-tout-le-monde-il-est-gentil» mais c’est un leurre – serait-ce d’ailleurs cela, le péché contre l’Esprit, de maintenir ce mensonge?
Ces exemples sont les signes d’un opprobre, disons, social, par ses pairs. Et arrive le «pire»: le différend avec la famille! La sacro-sainte famille du nucleus hébraïque et donc biblique va éclater en parcelles!
«Qui est ma mère, mon frère, ma sœur?», demande Jésus face à sa mère et ses frères! Imaginez un peu les échanges de regard, les sourcils qui se lèvent et s’abaissent, les langues qu’on tourne sept fois avant de… Oh, Jésus ne les insulte pas, il les remet à leur place dans le Royaume qui commence ici et maintenant, avec Jésus présent parmi les humains et avec celles et ceux qui «font la volonté de Dieu»… Aucun privilège de sang, de langue, de proximité avec Lui, juste un désir: faire la volonté de Dieu, et on est Son frère, Sa sœur, Sa mère…
On ne peut ergoter sur deviner quel est le péché contre l’Esprit sans d’abord se rendre compte du contexte: Jésus est accusé d’être démoniaque, fou, taré, débile parce qu’il annonce (cf les versets précédents) la fin des règles de pureté-impureté au cœur-même de la synagogue (l’homme à la main séchée est guéri) – où d’ailleurs il avait promené un regard «de colère»! Parce qu’il choisit douze hommes pêcheurs (notez l’accent circonflexe) après avoir guéri des malades et à la suite du témoignage par les esprits impurs qu’il est «le Fils de Dieu»!
Le monde à l’envers, dans le fond. Jésus renverse les codes, balance certaines convenances, fait fi des quolibets, et va même jusqu’à inventer le concept de famille sans liens de sang! Qui plus est, à qui l’écoute – comme les 12 en leurs débuts –, il donne «le pouvoir de chasser les démons»! Jésus fait tout à l’envers… à l’endroit!
Thierry Schelling