Paradoxe ! Jésus annonce que mourir est le chemin vers la Résurrection, alors que les disciples discutent, eux, de qui est le plus grand parmi eux ! Qui est le plus beau, le plus fort, le plus intelligent… Assez naturellement, une troupe humaine qui partage un quotidien, fût-ce avec Jésus, tôt ou tard en vient à la comparaison à l’interne : à connaître d’autres, il y a émulation… Le choix de Jésus quant à ses Douze n’a été motivé que par une seule chose : « Parce qu’il les voulait, eux. » C’est tout. Sans critères ou listes d’avantages-désavantages, de points forts ou de points faibles. Non, Jésus n’est pas le RH de service ; il est l’Ami par excellence.
Qui plus est, dernier ou premier, Jésus, Lui, comprend et connaît : Il sera le dernier – ou parmi les derniers ! – à être rejeté par ses proches, son quartier, son village, ses voisins – « nul n’est prophète au pays ! » – et sera considéré le dernier des prophètes, enseignants au vu de Sa lecture des Ecritures ; Il sera le premier-né d’une nouvelle façon d’aimer, de louer et d’honorer Dieu, Il sera le premier à ressusciter de la sorte, il sera le premier à accepter d’être considéré le dernier par les hommes ; il sera le premier pour Son Père. Il a brouillé les pistes, dans le fond, entre premiers et derniers…
« Pire » encore : c’est l’accueil d’un enfant qui est donné comme mesure de « comment accueillir Dieu dans sa vie ». Scandaleuse comparaison, non ? Oh, l’enfant n’est pas du tout le gentil angelot qui attire tendresse et silence et dont on a la photo jusque sur son ordi ! Oh, non ! L’enfant est certes une belle expérience – « Multipliez-vous ! » – qui fait penser aux géniteurs qu’ils ont accompli le commandement de Dieu, mais le nourrir, le faire grandir, le soigner, l’éduquer a un tel coût, jadis en tous les cas : école (pour les garçons !) ou travaux des champs, assistants non payés aux besognes du foyer comme aux métiers des parents, un enfant pouvait vite devenir, avant son autonomie, un fardeau.
Mais jadis comme aujourd’hui, quelle confiance chez tout parent dans l’accompagnement vers l’éclosion de fruit de ses entrailles ! Quelle générosité, abnégation, aussi. L’amour en barre, quand je regarde les parents alentour et reçois les confidences des unes ou des autres dans le secret de mon bureau. Non, jadis comme aujourd’hui, élever un enfant est héroïque.
Suivre le Christ est … héroïque quand on embrasse Ses critères ! On ne sera pas premier ou dernier, mais derrière Lui, toujours. On ne sera pas plus fort et moins triste, mais toujours à Ses côtés. La seule motivation qui doit nous faire avancer comme disciples, c’est l’amour de la personne de Jésus-Christ. Gratuitement. Inconditionnellement. Exponentiellement. Comment faire ? On peut s’y exercer en regardant comment nous accueillons un enfant…
Thierry Schelling