L’Évangile a casa 146: Lc 3, 1-6

L’Évangile a casa 146: Lc 3, 1-6

Tant de détails historiques qui ne se chevauchent pas quant aux dates : on est entre – 40 et 37 AD ! Mais les personnages, eux, ce sont les grands de ce premier tiers du 1er siècle. Morts ou vivants, ils imprègnent une époque pendant laquelle les auteurs de l’Evangile selon Luc rédigent leur ouvrage. « Historique » dans le sens qu’il ne tombe pas du ciel mais s’ancre, s’incarne bel et bien dans une histoire humaine – avec ses approximations mathématiques, certes, mais – plus intéressant – avec ses héros, ou anti-héros !

Et Dieu ne s’adresse à aucun d’entre eux ! Ni les politiques ni les grands-prêtres ne sont la cible de « la Parole de Dieu ». Non. Mais un quasi-inconnu (on le confondra avec d’autres), « dans le désert », donc loin de l’agitation des villes, des cours d’influence, des rumeurs décadentes, des foules frivoles. Oui, Dieu s’adresse à un homme vêtu de « poils de chameau » alors que les précités sont ornés d’étoffes précieuses pour dire leur statut et en « jeter plein la figure » de qui les voit. Sans compter des parfums qui les accompagnent. Or, Jean pue !

En effets et en parole : « baptême de conversion pour le pardon des péchés ». Loin d’un programme électrisant les citoyens pour acheter leur soutien ! Jean se glisse dans la lignée des prophètes. Etrangement, dans cette péricope, nous avons les trois dimensions du baptême (comme l’Eglise les définit) : rois (tétrarque, empereur…), prêtres (les grands de Jérusalem !) et prophètes (Jean et Isaïe)… Et Dieu se mêle aux prophètes d’abord – comme s’Il avait toujours été présent au monde dans leurs propos.

Et puisque Dieu commence Son avent parmi nous (on est un chapitre après celle de Jésus) avec Ses caractéristiques : « désert », « parole », « conversion », « pardon des péchés » plantée dans une constellation par trop humaine. Mais avec un carton d’invitation : « Préparez le chemin du Seigneur. » Car il vient. Comme on prépare une fête parce qu’on attend des invités qui ont confirmé qu’ils venaient.

Si on améliore les routes dans maints pays que vont emprunter les édiles locaux lors de leur visite de courtoisie et/ou de racolage, là, c’est une route intérieure, un chemin au-dedans de nous, que le prophète invite à niveler. Basiquement, Jean crie l’exhortation d’Isaïe à ôter les obstacles qui empêchent cette venue de Dieu dans mon histoire. Ce n’est pas que je doive « dés-obstacler » pour qu’Il vienne : Il vient, c’est sûr, c’est annoncé ! Mais ai-je envie de faciliter cette venue par un nettoyage de printemps…en hiver ? Serait-ce d’ailleurs un indice comme quoi Jésus serait plutôt né au printemps ? Dans chaque printemps de notre quotidien ? Que Sa naissance est un printemps, un primus tempus, un premier temps qu’aucun dirigeant humain ne saurait offrir ou garantir. Car c’est du « désert » que Dieu entame Sa venue, Son printemps. Pas à partir des palais dorés ni des ambitions et mesquineries humaines. Mais à partir du rien, du manque, de l’hiver… Et Dieu se fiance à mon histoire graduellement…

Thierry Schelling