L’Évangile a casa 150: Jn 2, 1-11

L’Évangile a casa 150: Jn 2, 1-11

Ah, une fête de mariage dans l’Evangile ! C’est bien la seule qui y soit répertoriée, même si des expressions et occasions de joie parsèment (pas assez à mon goût) le récit de la Bonne Nouvelle.

Un épisode de la série The Chosen le met magnifiquement en scène : préparatifs, mélange des couches sociales, fierté des parents des fiancés, et Jésus, invité, qui y retrouve sa mère. Et qui danse, rit, chante, ripaille. Mise en scène cinéma, certes, mais fort bien faite pour se rappeler comment Jean l’évangéliste conçoit le « commencement des signes » de Dieu-dans-le-monde : comme une fête de mariage ! On est à l’opposé de la figure hiératique, sérieuse et presque effrayante du Jésus aux traits byzantins…

Le mariage entre Dieu et l’humanité ; l’union entre ciel et terre ; les noces entre le Christ et chaque invité, dans le fond. Car sans être le protagoniste principal de la teuf, Jésus marque au moins les serviteurs qui ont vu l’eau changée en vin…

Oui, Dieu se révèle à celles et ceux qui servent, dans les deux sens du mot ? Servir, rendre un service ; servir, être utile. Ces mille et une « petites mains » des couturiers (tellement péjoratif quand on pense au travail accompli ; or, qui récolte les lauriers et l’oseille ?!) du quotidien, qui écoutent, accomplissent et partagent, selon la Parole du Maître. Pour créer du beau, du bon pour tout le monde.

Pas un mot sur le comment, aucune évocation de « miracle », mais juste un sobre : « Remplissez d’eau » et plus loin « Maintenant, puisez et portez ». Jésus détourne même la gratitude qui peut en naître sur le maître du repas qui, du coup, apostrophe le marié tenu pour responsable de ce rehaussement de la qualité du liquide festif… Seraient-ils comme deux avatars pour représenter, peut-être, Jean le Baptiste qui pointe du doigt Jésus (le maître du repas), et Jésus (le marié) ?

Quant à l’eau puisée devenue vin, n’est-ce pas l’eau du baptême qui devient joie avinée lorsqu’on s’y émerge et passe plus loin, à l’instar de l’eau du Jourdain franchie par le Peuple en errance dans le désert pendant 40 ans, et dont on comprend la joie une fois arrivé « sur l’autre rive » ?

A noter qu’au cœur de ce signe, il y a un savoir : « Ceux qui servaient le savaient bien, eux qui avaient puisée l’eau. » Comme si l’intimité de vivre les effets de Dieu-parmi-nous nécessitait une connaissance, au cœur du récit biblique, de Genèse (un arbre…) au synonyme pour « faire l’amour » (« tel ou tel connut sa femme… ») dans l’Ancien Testament. Là, Jean éclaire d’un goût nouveau la connaissance des serviteurs vis-à-vis des doctes: ce que sait le Christ, ce que veut le Christ, ce que fait le Christ, ce qu’est le Christ, est à « puiser et porter aux autres » qui veulent bien venir au gala : Dieu épouse le monde pour que nous l’aimions – le monde et Dieu ! – en le servant ! Car seul l’amour est utile… Et ce n’est que « le commencement des signes que Jésus accomplit »…

Thierry Schelling