L’Évangile a casa 164: Jn 14, 23-29

L’Évangile a casa 164: Jn 14, 23-29

« J’irai dormir chez vous », titre d’une émission TV où un globetrotter un tantinet rentre-dedans, réussit à se faire inviter chez des inconnus autour du monde, histoire de passer une nuit en hébergement gratuit chez l’habitant… Squatteur impertinent !

Là, le Christ déclare carrément : « Nous viendrons vers lui…et y ferons une demeure. » C’est « pire » : Demeurer, ce n’est pas une nuitée ; demeurer en « nous », ce n’est pas trouver un matelas d’appoint mis dans un coin ; « monè » en grec, pour dire « demeure », signifie en réalité « halte, arrêt, auberge, hôtellerie, monastère », du court au long, voire permanent, séjour en somme…

Et ce qui va déterminer le Père et le Fils à venir chez d’aucun, ainsi que la durée de cette présence divine en nous, c’est l’amour pour Dieu et son degré de « conservation » de Sa parole. Dit autrement, tu dis que tu aimes Dieu, alors garde Sa parole : médite-la, mastique-la, mange-la, sirote-la, digère-la… Avant la piété, la prière voire la charité envers autrui, c’est de garder Sa parole qui est la marque de l’amour du fidèle ou du disciple pour Dieu… Stimulant, non ?

Qui plus est, c’est l’Esprit Saint qui va être l’actrice principale de cette « inhabitation » de Dieu en moi : non seulement elle enseignera, mais elle fera souvenir – deux dimensions du dialogue intérieur pour qui accueille Dieu dans sa maison afin que Dieu y demeure. Car une fois venu habiter chez moi, Dieu demeure « Parole », donc échanges, discussions, éclats de voix, diatribes, tirades, bref…vivant !

Le chemin du Christ passe inexorablement par la Croix. Et le disciple qui la pleure, s’effraye, se morfond, déplore cette étape, n’a pas encore compris : « Si vous m’aimiez, vous seriez dans la joie » de ce départ vers le Père – la mort de Jésus – pour laisser tout l’espace humain à Son Esprit et ainsi revenir vers nous, en Ressuscité et en esprit. L’Esprit était le seul moyen pour être éternellement présent partout, envers tout un chacun, et capable d’entrer dans le cœur du fidèle, du disciple, activé par la rumination ovine de la Parole de Dieu…

Oui, la Croix a été la marque suprême et absolue de l’amour inconditionnel et éternel de Dieu pour Ses créatures et Sa création ! Plutôt que de s’en affliger, c’est Lui rendre grâce continuellement qui caractérise le disciple en phase avec son hôte intérieur… Qui plus est, les fruits que Dieu est EN nous – et pas juste AVEC nous, ou POUR nous – ce sont la paix et la joie dont parle Jean. Rasséréner son cœur, malgré les obstacles, la mort, et le mal, parce que graduellement plus confiant en un Christ présent en moi de par Son Esprit et qui, de la mort, tire toujours la vie, plus de vie, une vie plus vraie, voilà la tâche première de la croyante, du croyant en Dieu-fait-Homme. Se réjouir qu’un tel Dieu m’ait tant aimé.e pour se donner totalement, fixant ainsi l’illimité de l’amour comme limite vers laquelle tendre à partir de notre petitesse, voilà de quoi nourrir son dialogue intérieur avec l’Eternel…

Thierry Schelling