L’Évangile a casa 65: Luc 14, 25-33

L’Évangile a casa 65: Luc 14, 25-33

Haïr, la croix, renoncer à tout, NE PAS pouvoir être disciple du Christ… Ouf, rude rentrée indeed! Quand Jésus nous guérit et invite à Le suivre, on est plutôt contents. Satisfaits. Et on veut bien suivre.

Mais lorsqu’il conditionne la suivance (on dit comme ça) à ce choix RADICAL à faire: haïr (car le verbe grec, traduit mièvrement par «sans me préférer» dans nos versions liturgiques, est en réalité haïr, pourquoi édulcorer?) ses proches plutôt que se compromettre à Le suivre ET à tout de même rester liés aux nôtres, cela interpelle, dérange, déçoit peut-être – Jésus le Juif n’a-t-il pas honoré son père et sa mère selon le Décalogue?

Pire: la croix, symbole chrétien encore abondamment porté autour du cou par toute génération, y compris les adeptes de l’ère Post-Madonna… Si je ne la porte, et ne marche à sa suite, STOP, je ne suis pas disciple adéquat.

Renoncer à tout…quand on pense héritage pour ses enfants, assurance-maladie ou AVS… faut quand même pas pousser le bouchon trop loin, non?

Haïr, la croix, renoncer à tout…. Le Seigneur met en garde contre un certain mode d’être disciple – très répandu au demeurant – et dont parle le Pape François régulièrement sous le vocable de «mondanité».

Oui, confessons-le: il y a un aspect mondain dans notre manière de pratiquer. On veut un horaire de messe qui nous aille, si possible un célébrant qui me va, et pas trop long, et surtout réconfortant: le monde est si dur, j’ai besoin d’être cocollé. (Je l’entends [me] le dire…).

Sauf que, aujourd’hui plus qu’hier – mais peut-être pas en Romandie! –, devenir disciple du Christ peut être une question de vie ou de mort: au Pakistan, au Soudan, au Nicaragua… surtout quand on veut vivre fidèlement à la Personne du Christ, qui a apporté le glaive (et non la paix, comme le rappelle Luc): dans les familles, entre amis, collègues, vis-à-vis de son environnement sociétal… Comme c’est dur, ici, en Suisse, de devoir peut-être se priver de (électricité? gaz? choix d’aliments? vacances grâce à l’avion), on s’embourgeoise… On ronronne comme un chaton à qui on fait des gratouilles… mais gare aux griffes: griffe de l’exigence de l’Evangile!

Que ma foi soit imparfaite, ma prière maladroite, cela est moins important que notre volonté de mettre Christ – et son Evangile – au cœur de mon quo-ti-dien. Et, en relecture, vérifier où je crois (croissance et foi…). Voilà ce qui importe d’abord. Et ce faisant, on va souffrir : devoir quitter une relation avec un.e proche (=haïr dans le vocabulaire évangélique), devoir subir ma perpétuelle médiocrité (=ma croix), MAIS continuer à avancer, non pas en puritain mais en prodigue…qui se sait immensément aimé par un Dieu qui s’est fait détester, crucifier, et qui est … ressuscité!

Thierry Schelling